vendredi, juin 12, 2009
Mon chateau en Espagne
Audacieux ce dossier de 20 pages dans Libé d'aujourd'hui , une enquête sur l'énorme bulle immobilière que nous connaissons en France et dans certains pays d'Europe, avec de belles illustrations expressionnistes de Lolmede. Bulle portée avant tout par l'inconscience des banques qui se sont livrés à une course à l'échalote durant toutes les années 2000, en distribuant inconsidérément des crédits à long terme ( > 15 ans) à qui en voulait. Elles le regretteront et ont déjà commencé à provisionner en conséquence.
Très drôle d'abord, cet abécédaire qui permet de décrypter le jargon des annonces immobilières :
"A saisir par une offre" : le prix affiché est trop élevé mais le propriétaire ne veut rien entendre. une offre d'achat permettrait à l'agent immobilier d'argumenter
"Dans son jus" : qui n'a pas vu un pinceau depuis les années 70
"Fonctionnel" : aucun charme
"Coin cuisine" : adapté au frigo de Ken et au four de Barbie
"Travaux prévus" : ni votés ni payés
"Ville en pleine expansion" : impôts locaux démentiels pour financer les délires du maire
etc...
On y lit aussi un nième reportage sur Valdeluz, une des énormes cités fantômes en Espagne (pays où il y a 3,5 millions de logements vides), avec ce témoignage effarant qui reflète bien le bourbier dans lequel s'est mis ce jeune couple, certainement poussé par la "pression sociale" (familiale) :
"A la banque tout s'est bien passé. C'est malin d'acheter dans le neuf, avait dit le banquier, pestant contre le Vieux Madrid où il est impossible de se garer.
Ils en avaient pris pour 30 ans, ça les avait fait rire. D'avoir le même âge que leur prêt, à taux variable.
Dans moins de 3 mois, ils quitteraient papa-maman parce que c'est ainsi que ça se passe en Espagne. La location, c'est pour les cons. Alors certes, on attend pour réunir les fonds, mais quand on part c'est pour de bon".
Je vous passe les détails : ils se retrouvent seuls dans un immeuble gigantesque, sans aucune infrastructure autour. Déprime assurée. Bien invendable. Collés pour 30 ans.
Rassurez, vous, on a pas de villes fantômes en France, mais on s'amuse bien aussi. Lu par hasard, un article du Parisien d'hier sur cette femme de 43 ans, à Rouen, qui réalise son rêve de devenir propriétaire d'un appartement de 93 m2 à Rouen pour 660 euros par mois.
Puis, subrepticement, en lisant l'article, on apprend :
- comme elle n'a pas un radis d'avance, et qu'elle était locataire à 500 euros/mois, la mensualité de 660 euros / mois (+ 140 euros de charges) sera trop lourde. "Ma fille aînée va bientôt travailler, donc elle pourra nous aider."
- seule ombre au tableau, le prêt est remboursable sur 35 ans. "Mais ce n'est pas du tout ce à quoi pense la future propriétaire." dit le journaliste.
C'est surréaliste. Le journaliste ne relève pas que ça lui fait finir de rembourser à 80 ans, l'appart étant livrable en 2011 (l'acheteuse aura 45 ans quand elle commencera à rembourser). Les gens sont aveuglés par l'obsession d'être propriétaire à tout prix (voir mon article précédent) sans se poser des questions pourtant essentielles.
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