vendredi, octobre 03, 2008

Malingrëy, bien plus qu'un illustrateur de presse


Cela fait des années que je me lamente : les illustrateurs de talent ne sont pas reconnus à leur juste valeur. Je parle des artistes qui illustrent un texte dans le cadre d'un projet littéraire (un livre, quoi !), aussi bien que des illustrateurs de presse, dont le travail est plus éphémère. Parmi eux, j'aime particulièrement le travail de Rémi Malingrëy.

Malingrëy est une sorte de schizophrène du dessin :

- dans la presse "grand public" (Libé, Nouvel Obs, l'Equipe, SVM Micro, 60 millions de conso, ... ), il a un trait rond, souple, consensuel, ses couleurs sont plutôt douces. L'humour est souvent bon enfant, un brin désabusé. Jamais vraiment méchant.

- dans ses travaux plus personnels, son trait est plus anguleux, torturé, ses couleurs plus marquées. C'est ce qui m'avait plu dans cette grande gouache inédite - vous la verrez en tête de cet article - achetée il y a une douzaine d'années lors des ventes "Des Illustrateurs à Paris" qui se tenaient à Drouot. J'avais aimé le beau symbole du père qui montre le globe terrestre à son fils, avec ce long doigt qui n'en finit pas, et aussi les détails amusant du décor comme ce papillon encadré, la trompette, ou ces fleurs fanées qui piquent du nez.

Aussi, maintenant, j'essaie de suivre son travail ce qui n'est pas facile car les médias n'en parlent guère. "Ah, on classe Malingrëy dans les illustrateurs de presse, on ne va pas aussi le classer dans les artistes." pensent peut-être certains esprits fermés, comme nous en avons beaucoup en France. Cela m'horripile.

Dans mes archives, j'ai conservé un long entretien accordé aux Inrocks il y a une dizaine d'années où j'avais découvert qu'il était voisin à Nancy de son ami Lefred-Thouron (qui me faire mourir de rire dans Le Canard).
Parmi les travaux récents , on peut citer des expositions : "La maîtresse en maillot de bain", et les immenses doubles panneaux peints pour "Que du bonheur", ainsi que des dessins faits pour de nobles causes comme le soutien à Siné ou à Denis Robert.

Un autre aspect important du travail de Rémi Malingrëy sont ses très beaux romans graphiques chez Verticales : "Chagrin Mode d'emploi" où il parle du deuil de son jeune frère avec beaucoup de pudeur, et "Fumer de l'argent rend pauvre", dans un style assez similaire (tranches de vies quotidiennes, aphorismes, ...).

Comme d'autres artistes, tout ce travail de qualité mériterait d'être beaucoup plus exposé, mis en avant.
Par exemple par un bel artbook. Il est fort dommage qu'aucun éditeur ne se lance dans un tel projet. Je reste persuadé qu'il aurait un public intéressé par ce type de livre. Chiche ?
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